Jean-Louis Gerin est un des chefs français de la haute gastronomie aujourd’hui les plus reconnus aux Etats-Unis. Il est chef du restaurant Jean-Louis à Greenwich à côté de New York et nous parle de son expérience aux Etats-Unis.

Quel a été votre parcours pour travailler dans un restaurant gastronomique ?

J’ai fait l’école hôtelière de Thonon-les-Bains et j’ai choisi de travailler uniquement dans le luxe. Au début, je travaillais au SMIC dans cette catégorie de restaurants et mes parents continuaient à me donner de l’argent de poche. J’ai un gros handicap : je ne sais pas faire des frites !

Comment êtes-vous venu dans cette ville de Greenwich ?

Je suis venu directement à Greenwich et suis tombé amoureux de la ville. Je travaillais au sein du groupe Guy Savoy qui a décidé d’ouvrir un restaurant à Greenwich. J’ai été envoyé en observation pour améliorer son fonctionnement. A mon retour en France, Guy Savoy m’a proposé de le reprendre. J’ai géré le restaurant pendant 1 an et après Guy Savoy m’a demandé si j’étais intéressé pour l’acheter.

Pouvez-vous nous dire quelques mots sur Greenwich ?

Ce n’est pas une grande ville mais c’est une ville riche. Vous avez 2 sortes d’argent : celui des familles traditionnelles et celui des jeunes familles qui partent de New York pour chercher un endroit cosmopolite et intellectuel pour élever leur famille. Il y a de très bonnes écoles.

Vous aviez 27 ans lorsque vous avez repris le restaurant, comment cela s’est passé ?

Je suis allé à la banque pour demander un prêt ($250.000 ce qui était beaucoup à l’époque). J’ai été épaulé par l’équipe du restaurant. Je ne sais pas si c’est encore possible de faire comme cela. Cela m’a épaté à l’époque, les gens vous donnent une chance et vous font confiance. En garantie, vous avez votre éducation et votre expérience.

Pouvez-vous nous parler de votre restaurant ?

La maison mère est le restaurant Jean-Louis avec 12 personnes et une salle de 50 places assises. Nous avons d’autres activités comme un service traiteur que j’ai monté petit à petit. Pendant les 10 premières années, je me suis concentré uniquement sur le restaurant.

Quels sont les plats préférés que vous cuisinez pour les Américains ?

Il y a une salade que j’ai créée pour ma femme quand elle était enceinte. Elle ne mangeait que du caviar, j’étais presque en faillite ! C’est une salade à base d’endives, de citron et de crème fraîche avec 3 sortes de caviar des Etats-Unis. Aussi, les cailles farcies de quenelle de volaille servies avec une sauce aux truffes et enfin les coquilles St Jacques cuites au beurre de cacao.

Comment créez vous des nouveaux plats ?

Je suis toujours à la recherche d’une nouvelle émotion de mes clients. Leur proposer quelque chose qui va leur rappeler quelque chose. J’utilise des goûts très simples. Je ne fais pas de cuisine égoïste ou « flashy ».

Quel est votre rythme de travail ?

Je travaille beaucoup. Dix heures par jour, week-end compris parce que j’aime cela. Le week-end, je fais des radios, des télés ou des dîners de gala comme maître cuisinier où je représente la France.

Comment devient-on maître cuisinier ?

Quand on est parrainé par 2 chefs plus vieux que soi. On est proposé d’abord. Notre rôle est de promouvoir la cuisine française auprès des jeunes en les formant.

Quelles différences culturelles voyez-vous entre les Etats-Unis et la France ?

Pour l’éducation des enfants, c’est plus strict en Europe. On laisse ici les enfants étudier ce qu’ils souhaitent. Les employés aux Etats-Unis sont moins sérieux pour les petits boulots. Il faut être très diplomate.

Quels conseils donneriez vous aux personnes qui souhaitent ouvrir un restaurant aux Etats-Unis ?

Il faut y aller à fond. C’est dur 7 jours par semaine. Les Etats-Unis sont un pays dur mais généreux. La population est un melting pot, les gens sont sympas. Ils adorent les Français malgré ce que les médias en disent. On bosse aux Etats-Unis. Les résultats sont extraordinaires et enrichissants dans tous les sens du mot !