Portrait Beatrice Coron

Béatrice Coron, une Française devenue une artiste new-yorkaise. Elle nous raconte son parcours aux Etats-Unis où elle a débuté comme guide touristique pour finalement vivre une vie d’artiste spécialisée dans les illustrations en papiers découpés : des créations très esthétiques et originales.

Comment êtes-vous arrivée aux Etats-Unis ?

Je suis arrivée en 1984. Mon boyfriend était américain, c’est mon mari aujourd’hui. J’étais branchée sur la Chine. Je travaillais dans le tourisme comme accompagnatrice principalement en Chine. J’ai habité avant dans différents pays : Taïwan, Egypte, Mexique…

Quel a été votre parcours aux USA ?

J’ai passé ma licence de guide de la ville de New York pour notamment faire découvrir la ville de NY aux Chinois. J’ai emmené des Américains en Chine et je travaillais pour des agences françaises en Chine. Je suis maintenant artiste même si je continue à être guide occasionnellement à NY.

Comment devient-on “guide” de la ville de NY ?

Il faut passer un examen. On peut le préparer librement, étudier des guides, les principales dates de la ville. Ensuite, son diplôme en poche, il faut téléphoner à des agences pour vendre ses prestations. Depuis le 11 septembre 2001, la demande est beaucoup moins forte. Je connais des guides qui se sont convertis dans la traduction, dans l’immobilier…

Comment vous êtes-vous lancée dans une vie d’artiste ?

J’ai toujours aimé l’art. J’ai fait ma première vente de papiers découpés en 1993. Je faisais des dessins depuis longtemps. J’ai commencé par faire un programme pour l’Opéra de New York. J’ai réuni certaines illustrations dans mes premiers “Livres d’artiste” c’est à dire des livres faits main qui sont des mises en scène de texte et dessins. Je vends aux particuliers et je fais de l’art public : un monument pour les pompiers, des vitraux pour une station de métro à New York etc…. Je me suis lancée en pensant qu’avec le bouche-à-oreille, cela marcherait. Mais dans l’art, il y a beaucoup de compétition. Je me bats, je cherche des commandes d’art public, je fais des dossiers, je cherche sur internet et j’ai également quelques agents qui s’occupent de mon travail.

A quels prix vendez-vous vos oeuvres ?

C’est très différent selon le travail à réaliser, le détail, l’illustration, le temps passé sur une commande comme par exemple un arbre de vie, que j’avais réalisé pour la généalogie d’une famille. Les prix varient énormément de $50 à $10.000, ou plus pour les projets d’art public selon les matériaux utilisés, car les découpes peuvent être produites en pierre, verre ou acier.

Quelle technique utilisez-vous pour réaliser ces papiers découpés ?

Au lieu d’utiliser un crayon, j’utilise une lame. J’enlève ce qu’il faut pour que l’on voit le dessin. L’état d’esprit est le même que pour la sculpture : j’évide.

Qu’est-ce qui vous plaît à NY ?

On peut y faire plein de choses et trouver des activités culturelles, de la nourriture du monde entier. Si l’on veut apprendre le tibétain ou le japonais, il n’y a pas de problèmes.

J’aime aussi d’autres endroits aux Etats-Unis comme le Midwest (Iowa, Minnesota) où les gens sont très ouverts. Ils n’ont pas l’attitude des New-Yorkais qui ressemblent parfois aux Parisiens très stressés dans leur quotidien.

NY, c’est aussi à $300 de la France. En janvier ou février, si on a un coup de blues, on vient en France facilement. On a plus de visites aussi, l’hébérgement étant en plus très cher !

Qu’est-ce qui vous a surpris à votre arrivée aux US ?

Le bigotisme ! Ce côté ringard, un formalisme desuet. Vous ne pouvez pas rentrer dans certains restos si vous ne portez pas de veste pour un homme ou un “business attire”.

Si vous deviez rentrer en France, qu’est-ce qui vous manquerait des US ?

Plein de choses. Tout est ouvert tout le temps. On peut tout acheter sur internet. Faire ce que l’on veut quand on veut. Il y a peu d’administration, ce qui permet de faire les choses tout de suite. En revanche, il n’y a pas de filet de sécurité comme en France. Il faut être en bonne santé et actif.

Votre parcours aurait-il pu être possible ailleurs qu’aux Etats-Unis ?

Les Etats-Unis l’ont facilité. Ici tout le monde veut réaliser ses rêves. Les gens sont positifs. Quand j’ai commencé à me lancer dans les illustrations, on me disait : “Go for it, it’s good for you.” En Europe, on aurait dit : “Quelle idée de faire ça alors qu’elle a un boulot comme accompagnatrice ? Elle se prend pour Picasso !”
On se fatigue à la longue du boulot, autant faire quelque chose qui nous plaît. Si on se plante, on aura essayé. Le changement est perçu ici comme positif.

Crédit photo : Lisa Wigoda